Interview réalisée par Léonie Poulin: passeur de l’Atalante pour Largenté

 

 

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Katell Quillevéré est la réalisatrice d’un film poignant, Réparer les vivants, adapté du roman à succès de Maylis de Kerangal. A la fois tragique, riche en émotions mais remplie d’espoir, l’histoire ne nous laisse pas indifférents et nous bouleverse.

Simon, un adolescent, passionné de surf, décède brutalement. Très vite, ses parents doivent faire face à un choix décisif, celui d’offrir ou non le corps de leur fils à une personne inconnue, pour lui permettre de survivre.

Gabin Verdet, qui interprète le rôle du jeune donneur, a accepté de répondre à mes questions et de nous faire partager son point de vue sur le film et aussi d’évoquer ses projets. Gabin, nous te découvrons dans un superbe film.

Est-ce ta première expérience cinématographique ?  Oui, c’est mon premier film et aussi la première fois que je joue.

Pour ce rôle, as-tu été repéré en surfant par hasard ou bien fait un casting ?  Je suis tombé sur le casting grâce à facebook et c’est grâce au surf que j’ai pu y aller. Il y a eu un premier casting à Biarritz et un autre à Paris.

Tu n’étais pas comédien à l’origine ?  Non pas du tout, je n’avais jamais vraiment fait de théâtre avant.

Étais-tu impressionné de jouer aux côté d’acteurs aussi prestigieux qu’Emmanuelle Seigner, Dominique Blanc et Tahar Rahim ? Je ne les connaissais pas, donc je n’étais pas impressionné de jouer aux côtés de grands acteurs mais de jouer aux côtés d’acteurs tout court.

T’ont-ils soutenu ?  Oui, il y avait vraiment une très bonne ambiance sur le plateau. Si c’était à refaire ce serait avec grand plaisir.

Qu’as-tu retenu de cette expérience ?  J’ai retenu de nombreux moments exceptionnels passés avec l’équipe de tournage et cette équipe me manque. J’ai aussi retenu qu’il faut saisir la chance dès qu’elle se présente.

Qu’est ce qui t’a le plus marqué ? Je pense que c’est l’envers du cinéma, ce qu’on ne voit pas : les petites mains qui travaillent et tous ces décors que l’on ne perçoit pas à l’écran. Je ne vois plus aucun film de la même façon maintenant. On voit que tu surfes.

Depuis quand pratiques-tu cette activité ?  Depuis l’âge de huit ans.

Est-ce que pour certaines scènes tu as été doublé ?  Non pas du tout ! Je pensais plus surfer que jouer dans ce film au début. On a essayé mais on n’a pas réussi à me doubler : j’ai dit non.

As-tu lu le roman original de Maylis de Kerangal ?  Si oui, qu’as tu pensé de son adaptation cinématographique ?  J’ai lu le livre de Maylis et j’ai trouvé que Katell a réussi à raconter cette histoire à sa façon, avec son regard, et qu’elle ne s’est pas contentée d’adapter le roman au cinéma, mais de le faire vivre sous un tout autre angle. J’ai vraiment aimé son adaptation. Mais étant donné que c’est moi à l’écran, le film n’a pas l’effet voulu sur moi, « ça ne marche pas », je n’arrive pas à rentrer dedans.

Est-ce que tu as été sensible au sujet du livre et du film ? Avais-tu déjà réfléchi à la possibilité de donner une partie de ton corps ? Oui, et j’y avais déjà réfléchi.

Serais-tu maintenant prêt à donner tes organes ? Sans soucis, si je suis mort, autant que j’aide des personnes une dernière fois.

Donnerais-tu toutes les parties de ton corps, ou préfèrerais-tu, comme le souhaitent les parents du héros pour ses yeux, en conserver certaines, « symboliques » ?  Non je n’en ai aucune « symbolique », prenez tout !

Comprends-tu, malgré tout, les premières réticences du père de Simon ?  Oui bien sûr, tout à fait. Un père qui vient de perdre son enfant et qui n’a même pas fait son deuil n’a pas envie qu’on l’opère alors qu’il ne connaît pas le souhait de son fils. Ce qui est beau dans l’histoire c’est l’inversion des rôles : un jeune qui transmet sa vie à une femme qui pourrait être sa mère.

Est-ce que cela te touche ?  Oui, c’est très beau. Le film commence sur un plan de Simon amoureux, et se termine sur celui de Claire, qui ouvre les yeux avec le cœur de Simon. Dans la France d’aujourd’hui, marquée par les attentats, le don d’organes n’est-il pas aussi un acte de solidarité, de fraternité ?  Je pense oui, pourquoi pas, pour ceux qui en ont besoin. Dans la très belle scène de surf qui précède l’accident, le temps est comme suspendu et semble déjà annoncer la mort du héros.

Toi qui pratiques le surf, après avoir joué dans ce film, te sens-tu plus vulnérable, penses-tu à la mort ?  En surf, la mort? Non pas du tout ! Ça nous arrive rarement d’être en danger mis à part au début. On ne pense pas à la mort quand on est en situation périlleuse mais simplement, comme tu le dis, vulnérable et faible par rapport à cet océan.

Poursuis-tu tes études ou préférerais-tu continuer à tourner pour le cinéma ou éventuellement jouer au théâtre ?  J’ai essayé le théâtre mais ça ne m’a pas plu alors j’ai arrêté. Pour l’instant je poursuis ma terminale scientifique mais si je dois tourner dans un nouveau film alors je ferai les études en parallèle du tournage. Quant à ce que je préfère, je ne sais pas encore bien.

As-tu d’autres projets, dans le surf par exemple ? En surf, continuer les compétitions en long et viser la première place au championnat de France l’année prochaine, plutôt que la quatrième cette année. Et m’éclater comme je l’ai toujours fait !

Ce film t’a-t-il éclairé dans des choix de vie ?  Je ne pense pas. non. Quand je regarde le film, je ne vois pas le film et l’histoire mais les images et leurs histoires et je n’arrive pas à rentrer dedans. Et c’est normal puisque c’est mon premier film.

Léonie Poulin